COVID-19 : prendre soin de la santé mentale des parents
Le Québec est plongé dans la crise de la COVID-19 depuis maintenant plusieurs semaines et personne n’avait imaginé ce que nous allions traverser. Nous faisons ainsi face à l’inconnu. Nous savons toutefois qu’une frange de la population est très à risque en ce moment : les tout-petits. Pas en raison du virus, mais plutôt en raison des stress vécus par les adultes qui en prennent soin. Aujourd’hui, nous parlons des parents avec des problèmes de santé mentale.
La crise de la COVID-19 pourrait bien augmenter la détresse de ces parents. En effet, l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) souligne que les effets néfastes sur la santé mentale en cas de pandémie sont nombreux et peuvent perdurer dans le temps.
L’INESSS explique qu’en période de pandémie, les personnes atteintes d’un trouble mental pourraient avoir plus de difficultés à accéder aux services dont ils ont besoin.
Les mesures de confinement mises en place pourraient également accentuer les sentiments d’anxiété, de peur et de panique. Selon Christine Grou, présidente de l’Ordre des psychologues du Québec, les personnes déjà aux prises avec un problème de santé mentale peuvent aussi être plus à risque de souffrir de détresse psychologique lorsqu’elles sont isolées.
Les troubles de santé mentale des parents peuvent avoir répercussions sur le développement des tout-petits. Par exemple, selon certaines études, le fait de vivre une dépression pour la mère peut influencer la qualité de ses interactions avec son enfant et peut amener l’enfant à développer des problèmes de comportement. De plus, la dépression chez la mère peut aussi augmenter les risques pour les tout-petits d’être victimes de violence physique mineure, selon une enquête de l’Institut de la statistique du Québec.
Il est possible d'agir collectivement!
Offrir aux parents des services en santé mentale
Le 6 mai dernier, le gouvernement du Québec a présenté un plan d'action en santé mentale pour aider les Québécois qui en ont besoin. Cet investissement de 31 millions de dollars permettra de rehausser l'accès aux services psychosociaux et aux services de santé mentale dans le contexte de la pandémie de la COVID-19.Dans son rapport, l’INESSS suggère aux gouvernements d’adapter les services psychosociaux selon les besoins de la population et des groupes les plus vulnérables. L’organisme souligne aussi l’importance d’assurer l’accès à un ensemble de services en santé mentale. Le 15 avril dernier, le gouvernement du Canada annonçait d’ailleurs le lancement d’un nouveau portail consacré au mieux-être mental et dont le but est de faciliter le contact avec des intervenants formés comme des travailleurs sociaux et des psychologues qui pourront clavarder ou discuter au téléphone avec les personnes qui en ont besoin.
Dans le réseau de la santé, la Fondation de l’Hôpital général juif a lancé une collecte de fonds visant à amasser 5 millions de dollars pour financer plusieurs initiatives, dont certains programmes en santé mentale comme la télépsychiatrie. De son côté, Bell Cause pour la cause a annoncé de nouveaux financements pour cinq organismes offrant du soutien de première ligne en santé mentale.
Les organismes communautaires qui offrent du soutien en santé mentale font d’ailleurs beaucoup d’efforts pour adapter leurs services. Ainsi, l’organisme Revivre qui accompagne les personnes souffrant d’anxiété, de dépression ou de bipolarité poursuit sa mission même pendant le confinement. Ses intervenants peuvent en effet être rejoints par téléphone, courriel, par messagerie Facebook ou sur son forum de discussion. L’organisme Phobies-Zéro a développé pour sa part une solution de rechange aux rencontres en personne : des groupes virtuels « Zoom ».
Enfin, le milieu des affaires peut également agir pour la santé mentale. Par exemple, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain a lancé une gamme de services d’aide psychologique pour soutenir ses membres. Ces services, qui comprennent un soutien individuel par téléphone et l’accès à des webinaires, sont accessibles gratuitement pour les membres depuis le 21 avril.
Comment agir pour soutenir les parents?
DÉCIDEURS
- Renforcer le soutien économique aux familles vulnérables.
- Outiller tous les intervenants qui ont des contacts avec les familles pour dépister les situations de détresse qui peuvent mener à la maltraitance. Les soutenir afin qu’ils puissent accompagner les parents dans l’exercice de leur rôle et les diriger vers les bonnes ressources au besoin.
- Soutenir les organismes de proximité afin qu’ils puissent maintenir le plus possible un tissu social autour des familles en expérimentant de nouvelles avenues : des groupes d’échanges entre parents par visioconférence, des suivis téléphoniques auprès des familles qui fréquentent les haltes-garderies pour voir comment ça se passe, etc.
- Mettre en place certaines mesures comme celles recommandées par l’Observatoire québécois des inégalités pour mieux soutenir les sous-groupes de la population qui sont plus vulnérables aux effets de la pandémie. Par exemple :
- Un moratoire temporaire sur les obligations financières en s’assurant que les agences de crédit ne pénalisent pas la cote de crédit des plus vulnérables.
- Un effort national de recrutement de bénévoles à distance et de don de matériel informatique aux organismes voués à réduire l’isolement des personnes vulnérables.
- Création d’un comité consultatif réunissant les principaux experts et organisations œuvrant auprès des plus vulnérables pour identifier en temps réel les enjeux auxquels ces groupes font face, la production d’analyses et l’impact des politiques.
EMPLOYEURS
- Transmettre les coordonnées des programmes d’aide aux employés (PAE) ou de télémédecine ainsi que les lignes d'urgence aux employés.
- Faire preuve d’ouverture et témoigner à vos employés que vous comprenez leur réalité dans ce contexte de crise.
- S’entendre avec ses employés sur des livrables réalistes.
TOUS
- Appel à tous de la CDPDJ, visant à encourager les gens à : « téléphoner à ses nièces, ses petits-enfants ou ses jeunes voisins pour leur demander comment ils vont, à envoyer des messages courriel ou via les réseaux sociaux s'ils y sont présents ». Il est possible d’être là pour les autres via les technologies.
- Consulter la Trousse préparée par l’Ordre des psychologues du Québec, pour retrouver des conseils, des informations, des outils et des ressources.
- S’informer auprès de sources officielles au sujet du coronavirus et de la COVID-19, recensées ici par Naître et grandir, et s’appuyer sur des faits afin de relativiser la situation.
Si vous croyez qu’un enfant est maltraité, négligé ou manifeste des troubles de comportements sérieux, vous pouvez le signaler au Directeur de la protection de la jeunesse (DPJ) de votre région.
Ressources d’aide immédiate pour les parents :
- La LigneParents : service d’intervention accessible jour et nuit, gratuit, confidentiel et offert à tous les parents d’enfants âgés de 0 à 20 ans: 1 800 361-5085
- Tel-Aide : service pour toute personne qui souffre de solitude, de stress, de détresse ou qui a besoin de se confier : 514 935-1101
- Malgré le fait que les organismes communautaires famille soient fermés au public actuellement, la grande majorité assurent un contact téléphonique régulier avec les familles, maintiennent le services de banques et soutien alimentaires et offrent des activités d'échanges entre parents par visioconférence. Pour plus de détails
- La clinique juridique Juripop a instauré une ligne téléphonique d'urgence pour les victimes de violence conjugale qui pourront consulter un avocat gratuitement afin de régler une crise grave : 1 844 312-9009
Références
Centraide du Grand Montréal. (2020). Ici avec cœur en situation de crise mondiale [Communiqué].
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. (2020). Les enfants du Québec ont plus que jamais besoin de protection [Communiqué].
Observatoire des tout-petits (2017). Violence et maltraitance : Les tout-petits québécois sont-ils à l’abri ? Montréal, Québec : Québec : Fondation Lucie et André Chagnon.
Observatoire des tout-petits (2019). Dans quels environnements grandissent les tout-petits du Québec ? Portrait 2019. Montréal, Québec : Fondation Lucie et André Chagnon.
Observatoire québécois des inégalités, Inégaux face au coronavirus, 2020.
LAVOIE, Amélie et Catherine FONTAINE (2016). Mieux connaître la parentalité au Québec. Un portrait à partir de l’Enquête québécoise sur l’expérience des parents d’enfants de 0 à 5 ans 2015, Québec, Institut de la statistique du Québec, 258