Les impacts du virus sur la santé des enfants
Depuis le début de la pandémie, on entend souvent dire que les enfants sont moins vulnérables à la COVID-19. Pourquoi au juste sont-ils moins malades ? La réponse de Valérie Borde, du Centre Déclic.
La proportion d’enfants parmi les gens qui ont été infectés à la COVID-19 est encore incertaine, car tous les cas ne sont pas répertoriés. Une vaste compilation de 72 314 cas de Covid-19 publiée le 24 février par le Chinese Center for Disease Control and Prevention a établi que seules 2 % des personnes infectées avaient moins de 18 ans. Au Canada, 4,2 % des cas rapportés en date du 8 avril étaient des enfants, et 1,7 % aux États-Unis, en date du 2 avril.
À Wuhan, sur 171 enfants chez qui on a diagnostiqué une infection, 15,8 % n’avaient eu ni symptômes ni anomalies radiologiques, selon un bilan publié dans le New England Journal of Medicine. Les trois enfants de ce groupe qui ont dû recevoir des soins intensifs avaient d’autres maladies (une anomalie des reins, une leucémie traitée par chimiothérapie et une occlusion intestinale).
En analysant les cas de 2135 enfants chinois infectés, des chercheurs chinois ont découvert cependant que les tout-petits semblent plus à risque de complications que les plus grands. Dans cette étude publiée dans la revue Pediatrics, la proportion de cas sévères ou critiques était de 10,6 % chez les poupons de moins d’un an, de 7,3 % chez les 1 à 5 ans, 4,2 % pour les 6-10 ans, 4,1 % pour les 11-15 ans et 3 % chez les 16-18 ans. Comme de nombreux enfants n’ont pas été diagnostiqués, ces pourcentages sont probablement surévalués. Et ils restent bien inférieurs au 18,5 % de cas critiques ou sévères recensés dans l’ensemble de la population.
Quoi qu’il en soit, comme les adultes, les enfants peuvent propager la maladie, même sans en avoir de symptômes. D’où l’importance aussi pour eux de respecter la distanciation physique et bien sûr le lavage des mains.
On ne sait pas encore pourquoi les enfants semblent moins affectés par le SARS-Cov-2 que les adultes, si ce n’est qu’ils sont moins nombreux à souffrir des problèmes de santé chroniques qui se développent au fil du temps, comme le diabète, et qui accroissent le risque de souffrir de symptômes sévères. Ils ont aussi été exposés moins longtemps à la pollution de l’air, qui peut finir par affecter les capacités pulmonaires, et ne souffrent évidemment pas de la faible résistance aux infections qui finit par toucher nombre d’aînés.
La meilleure résistance des enfants pourrait avoir un lien avec les caractéristiques des coronavirus, croient plusieurs chercheurs : alors que les enfants souffrent plus souvent que les adultes des symptômes sévères de l’influenza, ils avaient aussi été très peu touchés lors des épidémies de SRAS et de MERS causées par deux autres coronavirus.
Selon les auteurs de l’étude publiée dans Pediatrics, cela pourrait provenir de l’enzyme de conversion qui sert de porte d’entrée des coronavirus dans les cellules du système respiratoire. Chez les enfants, croient-ils, cette enzyme pourrait se lier moins facilement au virus que chez les adultes, sans qu’on sache pourquoi. Parmi les adultes, d’ailleurs, les fumeurs et ceux atteints de la maladie pulmonaire obstructive chronique ont à la fois plus de symptômes sévères de la COVID-19 et plus d’ACE-2, selon une nouvelle étude publiée par des chercheurs de Vancouver dans le European Respiratory Journal.
Par ailleurs, il semble que les enfants, à moins d’être atteints de certaines maladies auto-immunes, soient moins susceptibles à l'emballement du système immunitaire qui causerait une partie des décès dus à la COVID-19 chez les adultes. Déjà, en 2004, des chercheurs avaient évoqué cette piste pour comprendre pourquoi les enfants avaient si peu souffert du SRAS.
Autre hypothèse : il est possible que beaucoup d’enfants aient eu, au moment du déclenchement de la pandémie, certains anticorps en partie efficaces contre le SARS-Cov-2, car ils sont souvent exposés, en hiver, aux autres coronavirus qui donnent le rhume ordinaire. Mais preuve que ce n’est pas du tout clair, d’autres chercheurs avancent qu’à l’inverse, de multiples infections passées, et donc une certaine immunité à des coronavirus, pourraient accroître le risque, pour les adultes, de réagir aux nouveaux coronavirus par des symptômes respiratoires plus graves.
Quoi qu’il en soit, comme les adultes, les enfants peuvent propager la maladie, même sans en avoir de symptômes. D’où l’importance aussi pour eux de respecter la distanciation physique et bien sûr le lavage des mains.