Covid-19 : une transition scolaire réussie
La transition scolaire est un changement majeur dans la vie quotidienne d’un tout-petit. Elle l’affecte de façon importante et se produit sur une très courte période de temps. Selon Nancy Schlossberg, professeure de psychologie à l'Université du Maryland, ce type d'événement transforme profondément les relations, les routines, les croyances et les rôles des personnes impliquées. En contexte de pandémie, cette transition est encore plus particulière pour les tout-petits. Qu'est-ce que la transition scolaire et pourquoi est-ce important de la réussir?
Qu’est-ce qu’une transition scolaire?
Julie Ruel est chercheuse au Département des sciences de l’éducation de l’Université du Québec en Outaouais. Elle est notamment l’auteure du rapport Les pratiques de transition lors de la rentrée des enfants au préscolaire, présenté au ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la recherche en 2015.
« La transition vers le préscolaire fait partie des transitions prévisibles, explique-t-elle. Il s’agit d’une période pendant laquelle autant l’enfant que sa famille, l’école et les autres intervenants qui l'entourent s’ajustent mutuellement à la rentrée scolaire.» Comme nous avons la chance de savoir à quelle date la transition scolaire arrive, nous avons donc la possibilité de la planifier, souligne la chercheuse. Cette préparation devrait débuter dans l’année précédant la rentrée scolaire.
Selon elle, l’accent est alors mis sur la préparation des enfants. « Il s’agit d’un volet important, mais on oublie souvent le transfert des informations concernant l’enfant entre les intervenants du préscolaire et le personnel du milieu scolaire. Il faut assurer une continuité entre les milieux fréquentés par l’enfant pour profiter le plus possible des connaissances. »
Comment la transition scolaire est-elle vécue par les tout-petits?
« La transition en elle-même est source d’anxiété, note Julie Ruel. Par ailleurs, pour certains enfants, l’arrivée doit être plus planifiée, car elle peut susciter un peu plus de défis. »
- problème de sommeil ou fatigue;
- pleurs fréquents;
- isolement et repli sur soi;
- problèmes de comportements;
- régression;
- diminution de la confiance en soi et de l’estime de soi.
En fait, selon certains auteurs, entre 8 et 21 % des enfants de la maternelle vivraient difficilement la transition vers la maternelle. Par ailleurs, une étude réalisée auprès d’enseignants américains de maternelle révèle que ceux-ci estiment que la moitié de leurs élèves connaissent des difficultés associées à la transition. De plus, cette étape peut être stressante pour les familles. Par exemple, une étude réalisée en 2017 indique que 80 % des parents aimeraient en savoir plus sur les attentes de l’école et 68% voudraient avoir de l’information sur la façon de préparer leur enfant pour cette nouvelle étape.
Quelles sont les répercussions de la pandémie sur la transition vers l’école?
Selon Julie Ruel et le Chantier montréalais "Transition vers l’école" d’Horizon 0-5, la période charnière que représente la transition vers la maternelle a été fragilisée par le confinement. En effet, les règles de distanciation physique ont forcé l’annulation de plusieurs activités qui réunissent habituellement l’école et les familles. Cette pause a pu mener à une perte de repères pour les familles. Cette perturbation des activités pourrait avoir nui au développement de liens de confiance de l’enfant et de sa famille envers l’école.
Comment la transition scolaire peut-elle influencer la réussite éducative?
Selon Mme Ruel, la transition est la fondation sur laquelle se construit le succès scolaire des enfants.
«Nous savons que l’ajustement aux premières années scolaires est marquant pour le parcours scolaire.»
La transition est particulièrement importante en raison des multiples changements qui se produisent dans la vie de l’enfant. « Il change de milieu de vie : soit de la famille à l’école ou du service de garde à l’école, explique Julie Ruel. On change de système : les règles, le nombre d’élèves par groupe, l’édifice, la façon de fonctionner, le transport scolaire, etc. Il n’est plus un petit, il devient un grand. » La transition vers la maternelle est un moment important puisqu’il permet à l’enfant, sa famille, l’école et la communauté de s’ajuster l’un à l’autre.
Par ailleurs, l’entrée à la maternelle est le moment idéal pour stimuler l’engagement des parents. « C’est une période où les parents sont très mobilisés, confirme Julie Ruel. Ils sont inquiets par rapport à l’école et la façon dont leur enfant va s'y adapter. Ils sont préoccupés par comment il va être accueilli et sur la gestion de l'école. C’est le bon moment pour établir un contact avec eux. »
Pour cette raison, les pratiques de transition sont particulièrement importantes. « Des études ont illustré que plus il y a de pratiques de transition mises en place dans les milieux, plus les parents perçoivent l’importance de ces pratiques, plus ils voient leur enfant s’ajuster à l’école et plus ils trouvent que l’école est prête à accueillir leur enfant, ajoute Julie Ruel. D’autres études ont montré que plus de pratiques est associé à un meilleur ajustement des élèves. »
« De plus, selon une étude réalisée auprès de près de 5 000 enfants de la maternelle, plus le nombre de mesures de transition est important, plus les enfants ont de bons comportements sociaux. Selon d’autres études, les pratiques de transition sont associées à de meilleurs résultats en lecture, en écriture et en mathématique à la fin de la première année scolaire.»
Enfin, les mesures de transition doivent s’ajuster aux besoins des enfants. «On peut mettre en place des mesures universelles pour tous les élèves. Par exemple, faire le lien avec les familles le plus tôt possible avant la rentrée scolaire, avoir des échanges accueillants avec eux, aller chercher l’information disponible sur les enfants. Ensuite, certaines mesures peuvent être mises en place pour un nombre un peu plus réduit d’enfants avec des défis particuliers. Finalement, certains enfants auront besoin d’une planification individuelle.»
- 88,3 % des CPE
- 81,2 % des garderies subventionnées
- 75,6 % des garderies non-subventionnées
- 52,8 % des services de garde éducatifs préparent un portfolio, un portrait ou un autre outil informant l’école sur les acquis et le développement de l’enfant.
- 55,1% des services de garde éducatifs proposent des affiches ou remettent des documents aux parents concernant le passage à l’école.
- 23% des services de garde éducatifs proposent des activités avec les enfants à l’école (p. ex. visite de l’école, activités dans le gymnase).
- 18,3 % des services de garde éducatifs organisent des discussions ou des rencontres entre le personnel du CPE et celui du milieu scolaire.