Guide de bonnes pratiques pour le développement des enfants pendant la pandémie
Afin d’épauler les intervenants en contact avec les familles et les enfants, l’Institut national de la santé publique (INSPQ) a publié un document pour faciliter l’identification des conditions nuisibles au développement des 0-5 ans et des stratégies à adopter pour en atténuer les impacts.
Ouverture des camps de jour et des services de garde, accès aux terrains de camping et aux parcs aquatiques… pas de doute : été rime avec déconfinement au Québec. Une bouffée d’air pour certaines familles qui ont eu plus de difficulté à jongler avec les difficultés qu’a amené la crise de la COVID-19.
Mais selon des experts, les effets de la pandémie sur le développement des petits pourraient continuer de se faire sentir encore longtemps. Des études ont démontré que ceux qui sont nés ou qui ont grandi lors d’une crise majeure sont plus susceptibles de développer des troubles physiques ou mentaux en vieillissant. C’est le cas du Projet Verglas, mené au Québec par Suzanne King, professeure en psychiatrie à l’Université McGill. Grâce au suivi de femmes enceintes pendant la crise du verglas de 1998 et de leur enfant, son équipe a pu observer que le stress maternel prénatal avait entraîné des risques accrus d’obésité, d'anxiété et de dépression chez les enfants.
Quelques facteurs de risque
- Augmentation du temps passé à la maison: risques de sous-stimulation, d’exposition accrue à des conditions de logement inadéquates, à des comportements parentaux violents et à des niveaux de stress toxiques;
- Perturbation des routines quotidiennes et des habitudes de vie: risques d’une diminution de l’activité physique et de la saine alimentation, d’une routine de sommeil irrégulière et d’une augmentation du temps d’écran;
- Réduction des relations sociales avec des adultes bienveillants: diminution du soutien informel à la famille, de certains services prescrits (santé et services sociaux) et des interactions essentielles au développement;
- Augmentation du risque de stigmatisation ou des inégalités sociales de santé: risques de racisme et de discrimination à l’endroit de communautés et de groupes parfois identifiés comme plus à risque ou responsables de la pandémie.
Quelques facteurs de protection
L’INSPQ identifie cinq facteurs de protection qu’il faut renforcer par des stratégies adaptées favorisant le développement des tout-petits.- Des besoins de base comblés et des pratiques parentales positives: sensibiliser les parents aux ressources d’aide et à l’autorégulation des pensées, des émotions et des comportements; leur offrir du soutien émotionnel; effectuer des suivis réguliers auprès des familles à risque de maltraitance; assurer la continuité des services de santé mentale et physique et; aider à l’organisation d’activités parent-enfant;
- Des routines favorables au développement cognitif, langagier, social et affectif: rappeler l’importance des routines quotidiennes et des gestes d’auto-protection (ex : lavage des mains); proposer des outils facilitant les communications parent-enfant sur la COVID-19 et la régulation des émotions des enfants et; encourager le partage d’histoires positives en lien avec la pandémie;
- Des pratiques familiales sécuritaires et responsables: valoriser la pratique d’activités physiques sécuritaires en famille; s’assurer que l’environnement physique familial est sécuritaire; partager des outils de gestion du stress, de l’anxiété et de l’incertitude et; aider les parents à prendre soin d’eux-mêmes;
- Des contacts avec d’autres milieux de vie et des adultes soutenants: favoriser les contacts virtuels en rendant le matériel nécessaire disponible; offrir du soutien psychosocial aux enfants; assurer la présence d’un adulte attentif quand le parent n’est plus disponible et; encourager le maintien de liens sociaux réconfortants respectant la distanciation physique;
- Un discours inclusif: rendre disponible une aide communautaire ciblée pour les familles marginalisées et informer les familles de l’aide financière et des programmes sociaux offerts.
Quelques conditions de succès des interventions
Pour que les stratégies mentionnées plus haut fonctionnent, l’INSPQ recommande notamment de :- Instaurer de nouvelles collaborations: avec des travailleurs des secteurs essentiels (ex : pharmacie et épicerie) pour détecter les besoins des familles vulnérables et les situations préoccupantes et; avec les employeurs pour qu’ils facilitent la conciliation travail-famille;
- Communiquer régulièrement avec les familles pour mieux connaître leurs besoins;
- S’assurer de la présence d’un parent sensible et réactif pour assurer une adaptation positive de l’enfant à la situation actuelle;
- Mettre en œuvre des services virtuels pour atténuer les risques de maltraitance et maintenir les suivis de santé de l’enfant;
- Tenir compte des différentes réalités familiales pour combattre les obstacles à la prestation de service (ex : accès restreint à Internet ou difficultés d’évaluer une situation familiale lorsque l’enfant vit avec l’agresseur) par des solutions comme l’utilisation du texto ou du courrier;
- Faciliter et soutenir l’accès aux mesures d’aide, comme l’approvisionnement alimentaire, la protection sociale, l’assistance matérielle et financière;
- Soutenir les familles dans les apprentissages à domicile pour favoriser la stimulation de l’enfant;
- Coordonner les interventions de tous les acteurs impliqués auprès d’une famille ou d’un enfant pour éviter les dédoublements ou les lacunes de services et pour planifier les actions aux différentes phases de la pandémie;
- Faire preuve de flexibilité (ex : mode de communication préférée des familles, disponibilités, etc.) pour maintenir le contact avec les personnes desservies.
Les premières années de vie sont cruciales dans le développement des enfants, cela en fait une préoccupation importante de santé publique. Pour atteindre leur plein potentiel, les conditions de succès des actions favorables au développement de l’enfant doivent aussi être maintenues et adaptées au contexte de la pandémie.