Des initiatives inspirantes pour soutenir les familles au bon moment
Il est possible d’agir collectivement pour éviter que des situations de maltraitance ne surviennent. Il est aussi possible de soutenir les familles et les tout-petits plus vulnérables qui vivent des situations de maltraitance. Les initiatives présentées ici en sont des exemples inspirants.
CISSS de la Montérégie-Ouest : une équipe d'Intervention Rapide et Intensive pour les enfants et leurs familles
Dans le but d’intervenir rapidement auprès des jeunes et des familles en situation de crise, la Direction des programmes jeunesse et des activités de santé publique (DPJASP) du CISSS de la Montérégie-Ouest a mis en place, le 15 avril dernier, une équipe d’Intervention Rapide et Intensive. Celle-ci répond rapidement aux situations de détresse psychosociale des jeunes et de leurs familles, en complémentarité avec le programme Crise-Ado-Famille-Enfant (CAFE).
L’équipe IRI vient en aide aux jeunes de 0 à 17 ans (excluant les enfants avec une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de l’autisme) et aux familles qui vivent une situation pouvant mener à une désorganisation ou leur porter préjudice si la demande de service n’est pas adressée rapidement. Les demandes peuvent découler d’un contexte de crise ou d’un besoin urgent, en lien ou non avec la COVID-19.
Les besoins, déjà criants avant la pandémie, ont explosé pendant le confinement. Le projet était déjà en branle avant la crise, mais on l'a déployé d'urgence pour répondre aux besoins des familles.
- Isabelle Papineau, coordonnatrice de l'équipe d'Intervention Rapide et Intensive du CISSS de la Montérégie-Ouest
SIAM : l’enfant au cœur des services
Inspiré du modèle américain des Child Advocacy Centers, les services intégrés en abus et maltraitance (SIAM) du CIUSSS regroupent sous un même toit les services de divers professionnels qui collaborent pour venir en aide aux enfants victimes d’abus ou de maltraitance. Parmi les acteurs rassemblés, notons, entre autres, un pédiatre expert en maltraitance, un policier enquêteur spécialisé en entrevue auprès des enfants, un intervenant social, un procureur aux poursuites criminelles et pénales ainsi qu’un agent de liaison à la coordination multisectorielle. Ouvert au public depuis août 2018, le SIAM a pour objectif la prise en charge globale de l’enfant victime d’abus ou de maltraitance ainsi que de sa famille pour leur éviter les déplacements d’un endroit à l’autre.
Dans une entrevue accordée à l’émission Mise à jour diffusée sur les ondes de MAtv, la coordonnatrice du projet explique que « ce sont des intervenants qui, constatant des difficultés dans l’application de l’entente (Entente multisectorielle relative aux enfants victimes d’abus sexuels, de mauvais traitements physiques ou d’une absence de soins menaçant leur santé physique, qui est en vigueur au Québec depuis 2001), ont soumis cette idée à leur direction afin de remettre l’enfant au cœur du processus.
À la base, c’est un projet qui est vraiment d’abord né sur le terrain.
— Paule Vachon, coordonnatrice des services intégrés en abus et maltraitance (SIAM)
Éclore Côte-Nord : changer de vocabulaire pour faire fleurir l’espoir
Inscrite au triste palmarès des régions considérées comme étant les plus défavorisées matériellement de la province, la Côte-Nord enregistre depuis quelques années un taux de maltraitance envers les enfants trois fois plus élevé qu’ailleurs au Québec. Le bas âge des mères au moment de la naissance d’un bébé, le salaire moins élevé que la moyenne québécoise, la monoparentalité et la condition des logements ont été cités en tant que facteurs de risque dans le Portrait des tout-petits de la Côte-Nord. De plus, la réalité du «fly-in-fly-out» vécue par de nombreuses familles de la région qui travaillent dans les industries nécessitant de partir plusieurs semaines avant de revenir à la maison pour plusieurs semaines, peut également créer des situations propices à la maltraitance. C’est devant ce constat que les différents acteurs déployés sur le terrain de la région se mobilisent depuis deux ans pour redresser la situation.
Pour aider les enfants, il faut agir en amont, que ce soit en intervenant sur le coût et la qualité du logement, sur la situation économique des familles, sur le développement des habiletés parentales, etc.
— Denise Langevin, présidente de l’organisation et ancienne directrice régionale de la DPJ.
Pour y arriver, Éclore Côte-Nord fait depuis ses débuts une vaste tournée « de bienveillance » auprès de tous les acteurs potentiels qui peuvent atteindre, de près ou de loin, les familles vulnérables. L’objectif? Sensibiliser l’ensemble des maillons de la chaîne d’intervention, mais aussi le « public ordinaire » à faire preuve de plus de bienveillance à l’endroit des tout-petits et de leur famille d’un bout à l’autre de la région. « On veut – et on peut! – devenir le coin de pays le plus bienveillant à l’égard de nos enfants. »
Grand Galop : le modèle de Saint-Hyacinthe
À Saint-Hyacinthe, les partenaires du milieu ont mis en place un projet qui visait à mieux rejoindre les familles vivant dans la pauvreté. La clientèle visée comportait plusieurs défis : conditions socioéconomiques difficiles, peu de moyens de déplacement, niveau de littératie moindre ou peu élevé, ou encore accès restreint à des moyens de communication comme Internet. De plus, les enfants de ces familles n’étaient pas inscrits au CPE, même ceux suivis par la DPJ et qui bénéficiaient pourtant de places réservées. C’est ainsi qu’à partir d’un prêt de service du CIUSSS, une intervenante de la DPJ s’est greffée à un projet de collaboration intersectorielle impliquant le CPE, le CIUSSS, des organismes communautaires et un centre de pédiatrie sociale. Cette intervenante de la DPJ a agi comme une travailleuse de proximité en allant vers ces familles, plutôt que d’attendre qu’elles viennent vers elle. Elle a su entrer en contact avec les familles, développer une relation de confiance et amener graduellement les parents à découvrir différents organismes pouvant les aider, ainsi que leurs enfants.
Cette proximité avec les familles a permis aux intervenants de rapidement reconnaître une série de barrières d’accès telles que : l’impossibilité de payer pour obtenir un certificat de naissance permettant d’inscrire l’enfant au CPE; l’incapacité à comprendre le contenu d’un document reçu par exemple d’un organisme gouvernemental; ou encore la perte d’une carte d’assurance maladie sans savoir comment procéder pour en obtenir une nouvelle. Une meilleure connaissance des barrières d’accès a permis aux intervenants de mettre sur pied diverses stratégies pour mieux aider ces familles.
Maison Oxygène : pierre d’assise du réseau
Unique en son genre à Montréal, la maison Oxygène, installée en plein cœur du quartier Hochelaga-Maisonneuve, offre depuis une trentaine d’années dans la métropole un refuge aux pères en crise. Réservée aux hommes et à leurs enfants, cette maison vient en effet en aide aux pères vivant des difficultés personnelles, familiales, financières ou conjugales.
La maison Oxygène est d’abord un centre d’hébergement temporaire pour les papas en situation de crise.
— Quentin Lebreton, intervenant communautaire à la maison Oxygène
L’idée est de leur offrir un espace pour souffler un peu et, surtout, pour se reconstruire afin qu’ils puissent reprendre ultimement le cours de leur vie. Concrètement, l’organisme propose trois volets d’intervention, allant du soutien matériel au suivi individuel, en passant par la mise en place d’un filet social. En plus de se trouver un toit temporaire, les hommes qui se présentent à la maison Oxygène sont pris en charge par les intervenants et soutenus dans chacune des étapes les menant vers la stabilisation.
Là où le bât blesse, c’est que les ressources manquent cruellement pour les pères sur l’île de Montréal. Nous avons beau offrir le meilleur service que nous pouvons, nous sommes limités, car nous n’avons que 12 chambres, laisse-t-il tomber. La liste d’attente est longue, donc nous ne suffisons pas à la demande.
— Quentin Lebreton
Le concept montréalais a toutefois fait des petits aux quatre coins du Québec. De Saint-Jérôme à Sept-Îles, en passant par Sherbrooke, Québec et Dolbeau-Mistassini, on trouve maintenant 14 maisons réparties sur le territoire, et 5 autres sont présentement en gestation.