Observatoire des tout-petits

Chroniques
18 décembre 2025

Préparations commerciales pour nourrissons : une hausse de prix marquée dans les dernières années

Préparations commerciales pour nourrissons : une hausse de prix marquée dans les dernières années
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Photo de Geoffroy Boucher
Geoffroy Boucher
Économiste et président de Décimal, analyses et politiques publiques

Le prix des préparations commerciales pour nourrissons a doublé en moins de 4 ans, affectant particulièrement les familles à faible revenu. Comment expliquer cette augmentation marquée ?

Selon le plus récent rapport sur le coût du Panier à provisions nutritif et économique (PPNE) à Montréal, un outil développé par le Centre de nutrition sociale et périnatale Alima et diffusé chaque année à l’automne, le prix des préparations commerciales pour nourrissons a bondi de 129 % à Montréal depuis octobre 2021, pour atteindre 53,32 $/kg en 20251.

Cette hausse de prix, observée sur l’ensemble du territoire québécois2, s’explique par les nombreuses ruptures de stock survenues au cours des dernières années ainsi que par le faible nombre de fabricants canadiens, selon Sylvain Charlebois, professeur à l’Université Dalhousie et directeur du Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire.

« La flambée du prix des préparations commerciales pour nourrissons découle d’une série de facteurs : les rappels massifs des grands fabricants ont perturbé les chaînes d’approvisionnement mondiales et le marché, qui est dominé par une poignée de multinationales. Comme le Canada ne fabrique presque pas de préparations commerciales pour nourrissons, nous dépendons des importations et du taux de change. » - Sylvain Charlebois


Figure. Coût des préparations commerciales pour nourrisson, Montréal

Graphique - Coût préparations commerciales pour nourrisson

Source: Alima (2025). Rapport 2024-2025 sur le coût du Panier à provisions nutritif et économique à Montréal.


Une hausse qui pèse lourd sur le budget des familles à faible revenu

Selon la directrice générale d’Alima, Julie Paquette, la hausse du prix des préparations commerciales pour nourrissons pèse directement sur le budget des familles, surtout celles qui y ont recours exclusivement.

De plus, les familles à faible revenu ont davantage recours aux préparations commerciales pour nourrissons. La proportion de bébés allaités exclusivement durant les quatre premiers mois de vie est en effet plus faible chez ces familles : 25,2 % contre 31,6 % dans les ménages à revenu moyen-élevé ou élevé3.

Cette dépense essentielle et difficilement compressible peut alors accentuer la précarité alimentaire chez les tout-petits, tout en suscitant du stress et de l’inquiétude chez les parents.

« Chez Alima, nous voyons beaucoup de familles qui doivent faire des choix déchirants au niveau des aliments par manque d’argent, soit en coupant certains aliments ou en diminuant même leur quantité de nourriture. Si l’allaitement n’est pas possible ou choisi, le coût des préparations commerciales pour nourrissons rajoute à cette pression monétaire. » – Julie Paquette

Des pistes pour mieux soutenir les tout-petits et leurs familles

Pour Sylvain Charlebois, l’enjeu réside dans la sécurité d’approvisionnement. Selon l’économiste, les gouvernements provincial et fédéral devraient encourager la diversification des sources d’approvisionnement et exiger davantage de transparence sur les marges des fabricants et des détaillants.

Julie Paquette souligne pour sa part l’importance de renforcer les programmes de soutien au revenu, afin de permettre aux familles à faible revenu de répondre à leurs besoins essentiels. Elle estime qu’une bonification de la prestation spéciale pour la grossesse et pour l’allaitement, de même que du soutien à l’achat de préparations pour nourrissons, prévus aux programmes d’assistance sociale du Québec, serait une mesure particulièrement prometteuse.

Enfin, la directrice générale d’Alima souligne l’importance de mieux accompagner les femmes qui allaitent, notamment en facilitant l’accès aux services de soutien et à des congés adaptés. Cette piste rejoint les constats d’experts américains, selon lesquels un accompagnement adéquat dès la grossesse accroît non seulement la probabilité d’allaiter, mais aussi la durée de l’allaitement4.

Photo de Geoffroy Boucher

Par Geoffroy Boucher

Titulaire d’une maîtrise en économie publique et politiques sociales de la London School of Economics, Geoffroy Boucher a œuvré au sein de plusieurs ministères aux niveaux provincial et fédéral. À titre d’économiste principal au ministère des Finances du Canada, il a notamment contribué au développement du plan pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants. Il agit aujourd’hui à titre d’économiste à l’Observatoire québécois des inégalités et comme président de Décimal, analyses et politiques publiques.


Pour aller plus loin

 
Consulter le rapport 2024-2025 sur le coût du Panier à provisions nutritif et économique à Montréal

Consulter la chronique Soutenir les mères qui décident d’allaiter, une responsabilité collective

Consulter toutes les données en lien avec l’allaitement sur notre tableau de bord

Notes
1. Alima (2025). Rapport 2024-2025 sur le coût du Panier à provisions nutritif et économique à Montréal.
2. Stéphanie Bérubé (2025). Préparations pour nourrisson : Des biberons de plus en plus chers, La Presse.
3. Institut de la statistique du Québec (2024). La santé, l’alimentation et le sommeil des bébés : faits saillants, un portrait à partir de l’étude Grandir au Québec.
4. US Preventive Services Task Force (2016). « Primary Care Interventions to Support Breastfeeding : US Preventive Services Task Force Recommendation Statement », JAMA, vol. 316, no 16, 2016, p. 1688-1693.