Mot de la directrice
Des inégalités dès la petite enfance
Les tout-petits vivent dans le vrai monde. Ils ne sont pas isolés des turpitudes de nos vies d’adultes. Bien au contraire, ce que vivent les adultes autour d’eux, les choix que nous faisons comme société, les politiques que nous adoptons, les mesures dans lesquelles nous décidons d’investir (ou pas) conditionnent les environnements dans lesquels ils vivent et, par voie de conséquence, la manière dont ils pourront grandir.
Or, force est de constater que les environnements dans lesquels grandissent les tout-petits au Québec peuvent, aujourd’hui encore, être remplis d’adversité.
Véritable tableau de bord des conditions de vie des enfants de 0 à 5 ans au Québec, notre Portrait 2024, réalisé grâce à la collaboration d’une dizaine d’experts, donne la mesure des inégalités qui touchent notre société dès la petite enfance. On y constate que certains enfants vivent dans des environnements qui présentent davantage de risques pour leur développement, qu’on pense à ceux issus de familles à faible revenu, monoparentales ou récemment immigrées.
Il est préoccupant de constater que, pour une proportion importante de familles avec des tout-petits, répondre à leurs besoins de base représente un défi. Près de 20 % des familles avec de jeunes enfants vivent en situation d’insécurité alimentaire. Le logement, un autre pilier du bien-être des tout-petits, est également en crise. En 2021, un quart des familles vivait dans des logements inadéquats, parce que trop petits, trop chers ou en mauvais état. De plus, la qualité des services de garde éducatifs à l’enfance, essentielle pour le développement des enfants, est en déclin.
Cette dégradation des conditions de vie dès la petite enfance a de quoi interpeller tous les décideurs. À titre d’inspiration pour guider leurs actions, ce Portrait 2024 présente plusieurs pistes de solution concrètes. Par exemple, bonifier les mesures de soutien financier pour les familles plus défavorisées, créer davantage de logements à but non lucratif, faciliter l’intégration des parents issus de l’immigration, offrir des services adaptés aux besoins des familles isolées et soutenir les initiatives qui visent l’amélioration de la qualité éducative dans les services de garde.
Oh, tout n’est pas sombre dans ce Portrait 2024! On constate, par exemple, que le congé parental est de plus en plus souvent partagé entre les deux parents, ce qui favorise entre autres l’engagement des pères dans la vie de leurs enfants dès le plus jeune âge.
Cette évolution positive n’est pas arrivée par magie. Elle est le résultat d’une politique publique créative, résolument conçue pour soutenir les familles et le développement des enfants. Elle est aussi la preuve éclatante qu’il est possible d’améliorer les conditions dans lesquelles grandissent les tout-petits. C’est ce dont les enfants ont besoin : qu’on crée des environnements favorables au développement de leur plein potentiel, peu importe le milieu où ils naissent et où ils grandissent.
Julie Cailliau,
Directrice, Observatoire des tout-petits