Observatoire des tout-petits

Crise du logement : pourquoi il faut protéger nos tout-petits

Portrait de Julie Cailliau
Julie Cailliau
Directrice de l’Observatoire des tout-petits
23 mars 2024

Les conséquences de la malnutrition sur la santé et sur le développement des jeunes enfants sont maintenant bien connues, mais qu’en est-il du mal-logement ? Qu’arrive-t-il quand un tout-petit doit vivre dans un endroit trop petit pour sa famille, insalubre, ou tout simplement trop cher pour ses parents ?

Alors que des milliers de locataires reçoivent en ce moment des avis de hausse de loyer ou de résiliation de bail, nous souhaitons éclairer une situation préoccupante.

La crise du logement sévit partout et représente un stress élevé pour nombre de parents de tout-petits. Selon l’Enquête québécoise sur la parentalité réalisée en 2022, le quart des parents d’enfants de 0 à 5 ans considèrent qu’ils n’ont pas les moyens de subvenir aux besoins de base de leur famille, soit l’alimentation, le logement et les vêtements.

Il y a aussi des familles plus affectées que d’autres. Par exemple, selon l’Enquête québécoise sur le parcours préscolaire des enfants de maternelle de 2022, les familles immigrantes et à faible revenu sont plus susceptibles d’habiter dans un logement présentant au moins une forme de nuisance comme des odeurs, de la moisissure, des insectes ou encore des rongeurs.

Des conséquences sérieuses sur la santé et le développement

La précarité du logement entraîne des conséquences sérieuses sur le développement des tout-petits. Par exemple, les tout-petits qui habitent dans un logement trop cher pour leurs parents ont souvent un plus petit poids que les autres enfants du même âge car leurs parents ont peu d’argent à consacrer aux besoins de base, dont l’alimentation.

La recherche montre aussi que vivre dans un logement trop bruyant et trop petit réduit l’attention que le parent peut accorder à son enfant, la qualité et le nombre de leurs interactions, et peut augmenter le risque de maltraitance.

Les enfants en bas âge sont encore plus susceptibles d’avoir des problèmes de santé liés à l’insalubrité du logement, comme l’asthme et les troubles du sommeil. L’insalubrité peut également causer des symptômes dépressifs chez les parents et leurs tout-petits.

Certaines familles sont ainsi poussées à déménager fréquemment, ce qui peut accentuer les défis auxquels elles font face avec leurs enfants.

Des leviers pour inverser la tendance

À l’inverse, habiter dans un milieu de vie de qualité, dans un logement salubre, assez grand et dans un quartier sécuritaire influence positivement la capacité des parents à prendre soin de leur enfant, et donc la santé des tout-petits. Nous avons donc intérêt, collectivement, à multiplier les efforts pour l’accès aux logements de qualité pour les familles.

Miser sur le logement social et communautaire, c’est-à-dire sans but lucratif, est considéré par la recherche comme étant une avenue prometteuse. Dans sa nouvelle stratégie d’habitation dévoilée en décembre 2023, la Ville de Longueuil s’est d’ailleurs fixé l’objectif de porter à 20% la part de logements locatifs à but non lucratif sur son territoire, passant de 4 666 à 17 500.

On retrouve au Québec plusieurs exemples d’innovations pour faciliter l’accès au logement. Pensons au Domaine La Rousselière dans l’est de Montréal, dont les 720 logements ont été retirés du marché privé grâce à une acquisition par la Corporation Mainbourg. Les logements, allant du studio à des appartements de 1 à 3 chambres, demeureront ainsi abordables à perpétuité, dans un quartier bien desservi par les services et le transport collectif.

Plusieurs de ces projets ont été rendus possibles grâce à une implication citoyenne active et à la contribution d’une multitude d’intervenants des gouvernements, du secteur privé et du milieu communautaire.

Le logement est un droit humain reconnu par l’ONU dans le cadre du Pacte international des droits économiques, sociaux et culturels dont le Canada est signataire. Misons sur le travail concerté de tous les acteurs afin d’inverser la tendance et offrir de meilleures conditions de développement à nos tout-petits.

Julie Cailliau

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